Pour qu’ils ne soient pas morts pour rien
Depuis 2 mois, la planète vient d’apprendre la puissance d’une courbe exponentielle.
Nous avons compris qu’une fois lancée, la croissance exponentielle double tous les X jours et que sa croissance est inarrêtable. Enfin, elle peut s’arrêter éventuellement, au prix de tout arrêter.
Alors nous avons tout arrêté et nous regardons si ça marche. N’ayant pas pu éviter l’inévitable, n’ayant pas écouté les avertissements quand nous étions encore en phase 1 ou en phase 2, nous utilisons le dernier parachute troué que nous avons et on attend, impuissants. Parce qu’il est trop tard pour éviter l’inévitable.
Nous ne sommes plus en train de regarder le nombre de morts ou de nouveaux cas, nous sommes en train d’apprendre à observer le ralentissement de l’accélération comme le dit lemonde.fr ce jour :
Nous regardons si l’accélération a diminué. S’il y a moins de plus qu’avant, que la veille, que le jour d’avant, que le jour d’encore avant. Nous surveillons le pic. Nous espérons que bientôt, il y aura encore des morts, mais moins que la veille. Nous savons qu’il n’y en aura pas subitement 0, nous savons que d’abord l’augmentation diminuera…
Nous prions pour que ça passe le plus vite possible, que chaque jour où nous avons tardé à déclencher le confinement, que chaque jour où nous n’avons pas pris nos responsabilités passe le plus vite possible.
Nous sommes condamnés à contempler les conséquences de nos actes d’il y a 2 semaines, d’il y a 3 semaines, la propagation du virus à travers nos actes, ses conséquences à J+20 sur notre système de santé. Ne pas avoir à supporter trop longtemps toute la responsabilité que nous portons de ne pas avoir su réagir à temps, de ne pas avoir su nous préparer.
Pendant ce temps là, les soignants soignent, les médecins meurent, les caissières épongent, tous les métiers indispensables tiennent et maintiennent, au péril de leur vie, dans des conditions désastreuses, criminelles, ils absorbent notre impréparation. Ils essuient de leur vie notre connerie collective. Ils payent de leur courage et de leurs corps les choix faits par nos dirigeants. Ils mourront pour nous à cause d’eux.
Nous leur devons la vie.
Ils mettent en danger la leur pour que nous n’ayons pas à risquer la notre.
Ils sont le prix de notre patience. Ils sont le rempart qui nous permet de regarder les chiffres, confinés chez nous.
Nous avons immobilisé et contraint à domicile 3,7 milliards d’humain pour un virus. Un tout petit virus qui nous transforme tous en machine à tuer notre prochain et à faire sauter notre système de sauté mondial.
Nous sommes devenus des minuteurs sur pattes, risquant de précipiter papie ou mamie dans l’au-delà. Même si ce n’est que 20% d’hospitalisation et 5% de létalité, nous les humains, du fait de notre bêtise, de noter impréparation et de la contagiosité du virus sommes devenus autant de balles fatales dans nos systèmes hospitaliers.
Rien ne semble plus tenir. Rien ne semble pouvoir arrêter le virus que l’arrêt complet de la planète, de toute activité non essentielle. Et encore, pour l’instant, cela ne l’arrête même pas. Le virus se propage encore. Nous le propageons.
Et comme tout le monde est touché en même temps, nos voisins ne peuvent plus nous aider car ils ont les mêmes besoins que nous. Et comme tout est mondialisé, les chinois ne peuvent plus nous aider, les transports de l’autre bout de la planète qui en temps normal font la puissance de cette mondialisation en font aujourd’hui le talon d’Achille. Chaque choix justifié en temps normal comme une qualité pour faire du moins cher et plus vite devient une épine dans le pied, une aberration. Chaque raisonnement qui en temps de business as usual était imbattable devient une ignominie dans la situation actuelle. Plus rien ne fait sens. L’ISF, les dons pour l’hôpital, se fournir en chine, importer des masques, compter sur l’aide des voisins européens… rien de tout ce qui est prévu en temps normal ne tient la route. Et nos hôpitaux, notre système de santé ne peut rien faire face à un nombre de cas qui double tous les X jours. Une quantité limitée de lits se fera toujours dépasser par une croissance exponentielle. Si ce n’est pas demain, ce sera après-demain. Si pas après-demain, dans 2 ou 3 jours de plus. La question n’est plus si mais quand.
Nous sommes KO.
Notre système et son système a fait son temps.
Il est mort avec les presque 60 000 vies qu’il a payé et toutes celles que sa logique met en danger inutilement.
Tout était prévu
Ce n’était pas juste prévisible, c’était prévu. On le sait. On le savait. On ne savait pas quand, mais on le savait, qu’une épidémie, que des épidémies nous menaçaient. Il y en a d’autres, de nombreuses autres qui vont arriver, on n’en connait pas encore les formes, les intensités ou les dates de sorties, mais elles sont déjà là, à guetter dans le coin d’une forêt que nous n’avons pas encore rasé. Au fur et à mesure que nous envahissons un peu plus et colonisons l’espace, les habitats naturels des espèces sauvages encore préservées, nous allons titiller le jeu des forces en présence et déclencher la ou les prochaines épidémies.
C’était écrit donc. On le savait. On le savait et on n’a rien fait. Chacun a minutieusement diminué les risques, minimiser le danger pour réaliser des économies. C’est ça, être responsable.
La facture est encore en train de se chiffrer dans les heures où j’écris ces lignes. Le nombre de mort au niveau de la planète, le temps passé en confinement, l’isolement, l’angoisse et la solitude, les économies à l’arrêt… ce temps de réflexion nous est offert par l’impréparation et l’imbécilité de nos dirigeants. Tâchons de faire mieux qu’eux, collectivement. Que le prix de ces déjà 60 000 morts ne soit pas en vain.
Malheureusement, cela ne nous donnera que le résultat de l’addition du premier passage, et nous savons que sans dépistage massif, sans vaccins, sans remède magique, sans solution de déconfinement global, nous allons devoir jongler avec le virus et les gestes barrières pendant un certain temps encore.
Tout est prévu
Il y a d’autres rapports sur la table qui nous préviennent déjà des risques, d’effondrement, de croissances exponentielles inarrêtables dont les actions doivent auraient dû déjà être prises pour éviter l’inévitable.
Des croissances exponentielles dont le temps entre l’action et la réaction ne se mesure pas en 3 semaines. La concentration de CO2 dans l’atmosphère par exemple.
Chaque gramme de CO2 que nous émettons et envoyons dans l’atmosphère y restera pour … 10 ans? non… 100 ans?? non … alors vous avez une idée?
La conséquence de chacune de nos actions ou plutôt de nos non actions face au réchauffement climatique nous condamne pour 1000 ans.
Agir maintenant
Il y a un intérêt à la situation : apprendre de nos erreurs.
Agissons dès maintenant pour prévenir les autres croissances exponentielles et leurs dégâts colossaux sur nos environnements, nos populations. Déjà des milliers de morts de la pollution, des populations fragilisées par tous les bouleversements que notre société a créé.
N’attendons plus. Que cette situation nous serve de leçon et que nous l’apprenions.
Pour qu’ils ne risquent pas leur vie pour rien.
Pour qu’ils ne soient pas morts pour rien.